Réussir en Transformant l’Échec Entrepreneurial


Fermer son entreprise est une réalité pour de nombreux entrepreneurs. Depuis un quart de siècle, environ 52 000 sociétés cessent leurs activités chaque année. Hélas, cette situation est souvent vécue par les dirigeants avec un sentiment de honte lié à l’idée d’avoir échoué.

Les Entrepreneurs Français Face à L’Échec : Une Réflexion Nécessaire

Une récente étude du laboratoire d’idées de la Banque publique d’investissement révèle que les entrepreneurs français manquent souvent de préparation pour anticiper les échecs. Cette enquête, menée auprès de 880 dirigeants, dont la moitié a traversé des procédures amiables, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation, met en lumière plusieurs aspects inquiétants des mentalités entrepreneuriales actuelles.

Il en ressort que l’optimisme inhérent aux chefs d’entreprise peut devenir un obstacle. Confrontés à des difficultés telles que la réduction des marges, des problèmes de trésorerie, ou des résultats négatifs, bon nombre d’entre eux croient pouvoir surmonter ces défis seuls, sans accompagnement. Cela s’explique en partie par une vision punitive de l’échec. En effet, 75 % des dirigeants n’ayant pas vécu ces procédures estiment que l’échec est systématiquement dû à une mauvaise gestion. En d’autres termes, si l’entreprise chute, c’est nécessairement la faute de son leader.

Une Histoire de la Peur du Tribunal de Commerce

« Cette perception est l’héritage direct de l’histoire du droit des faillites en France », explique Philippe Mutricy, directeur des études chez Bpifrance. Il rappelle qu’au XVIIIe siècle, les entrepreneurs en faillite faisaient face à l’humiliation publique. De nos jours, malgré les réformes, le tribunal de commerce reste encore largement perçu comme punitif plutôt qu’aide.

Beaucoup de dirigeants ignorent l’existence des procédures amiables, qui peuvent pourtant offrir un soutien préventif. C’est ainsi que nombreux franchissent directement les étapes de sauvegarde, redressement ou liquidation, atteignant souvent un point de rupture psychologique. En effet, l’étude montre que trois quarts des dirigeants se sentent épuisés, un tiers subit des troubles anxieux ou dépressifs, et un tiers doit faire face à des séparations ou divorces.

Paradoxalement, passer par le tribunal de commerce peut souvent s’avérer libérateur, représentant un début de deuil et de recul. Les dirigeants découvrent soudain qu’ils ne sont plus seuls à porter leur fardeau.

La Fusion Entre L’Entreprise et l’Identité Personnelle

Rebondir après un échec entrepreneurial est loin d’être simple. Près de la moitié des chefs d’entreprise se retrouvent en difficulté financière, un chiffre qui s’élève à 63% quand il s’agit de liquidation. De nombreux chefs d’entreprise ont du mal à réunir les fonds nécessaires pour lancer un nouveau projet.

Les plus résilients sont ceux qui réussissent à transformer leur échec en récit positif, ce qui rassure potentiellement les partenaires financiers. « L’important, » résume Bao Tran Nguyen, directrice adjointe du Lab, « est d’anticiper les difficultés financières à temps et de se rappeler qu’une défaillance est un épisode stressant mais pas la fin sociale pour son dirigeant. »

Il est essentiel de changer la culture de l’échec en France pour soutenir l’innovation et la prise de risque mesurée. Les entrepreneurs doivent être encouragés à voir l’échec comme une étape d’apprentissage plutôt qu’une sentence définitive. L’évolution de cette perception permettra non seulement de réduire le stigmate mais aussi de favoriser un écosystème entrepreneurial plus dynamique et résilient.