Smic à 1 600€ en 2024 : Pourquoi ça Divise


La coalition de gauche, qui a remporté les récentes élections législatives anticipées, suggère entre autres de porter le salaire minimum à 1 600 euros nets. Voici quatre questions pour mieux appréhender cette proposition controversée parmi les économistes.

Proposition de Hausse du SMIC à 1600 Euros Net : Une Mesure Controversée

L’augmentation du salaire minimum à 1600 euros net est une des propositions emblématiques du programme économique du Nouveau Front Populaire. Actuellement fixé à un peu moins de 1400 euros par mois, ce boost équivaudrait à une hausse de 200 euros nets sur la fiche de paie et serait une réponse directe aux défis du pouvoir d’achat pour de nombreux salariés. Toutefois, cette proposition suscite de vifs débats parmi les chefs d’entreprise et les économistes, divisant profondément les avis.

Comment le Nouveau Front Populaire envisage de financer cette initiative? 

L’alliance des partis de gauche prévoit de soutenir les très petites entreprises (TPE), celles susceptibles d’être les plus affectées par une telle augmentation du SMIC. Le Nouveau Front Populaire propose plusieurs pistes pour accomplir cela : l’octroi de crédits à taux zéro via un « pôle bancaire public », des facilités temporaires de trésorerie et un accès simplifié aux marchés publics pour ces TPE. Néanmoins, le coût exact de ces mesures n’a pas encore été clairement établi.

Il existe déjà des exonérations de charges patronales pour les bas salaires qui ont coûté 30 milliards d’euros en 2022 – une manne financière que certains membres du NFP estiment pouvoir être réutilisée efficacement. Un économiste favorisant le programme économique du NFP admet qu’il y aura un coût net « assumé ». Cependant, il anticipe que les ménages français verraient une augmentation collective de revenus d’environ 10 milliards d’euros, susceptibles d’alimenter la consommation.

Pourquoi cette proposition suscite-t-elle des critiques chez la majorité présidentielle, la droite et le patronat?

La proposition d’un SMIC à 1600 euros est vue comme une « machine à détruire l’emploi » par des figures telles que Gabriel Attal, le Premier ministre. Selon lui, cette mesure pourrait menacer jusqu’à 500 000 emplois. Une enquête récente de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) révèle que 14% des dirigeants d’entreprise affirment qu’ils seraient contraints de fermer, tandis que plus d’un quart envisagent de licencier une partie de leur personnel si la mesure était mise en place.

La Fédération du bâtiment, qui a récemment annoncé la suppression de 25 000 emplois pour le premier trimestre de 2024, juge également cette proposition « extrême » dans le contexte économique actuel. Le ralentissement de ce secteur crucial serait exacerbé par un tel coup de pouce au SMIC, d’après leurs prévisions.

La question des salaires figure-t-elle parmi les priorités de l’exécutif?

Lorsque Elisabeth Borne était à la tête de Matignon, la « désmicardisation » figurait parmi les principaux sujets de la rentrée sociale. Un Haut Conseil aux rémunérations a même été instauré pour répondre à cette question cruciale pour les travailleurs. Actuellement, 17% des salariés français perçoivent le salaire minimum, chiffre qui pourrait atteindre 20% avec cette nouvelle mesure, soit un salarié sur cinq. La préoccupation est donc bien réelle et justifie des actions concertées pour adapter les rémunérations.

Cette mesure risque-t-elle d’accentuer la « smicardisation » du pays?

Le risque existe bel et bien, mais la tendance est en place depuis 2021. Au cours des trois dernières années, le salaire minimum a été relevé huit fois pour suivre le rythme de l’inflation. Par conséquent, le SMIC a déjà rattrapé les salaires de nombreux autres travailleurs, souvent plus expérimentés, mais dont les rémunérations stagnent. Beaucoup de salariés avec 10 à 30 ans d’ancienneté se trouvent désormais alignés sur le salaire minimum.

Gilbert Cette, économiste et président du comité d’experts sur le sujet, rappelle que « Rester des années au SMIC est pire que le fait d’être payé au SMIC ». La mobilité salariale devient donc essentielle ; il est crucial de revoir les minima de branche et les grilles salariales, des initiatives qui relèvent de la responsabilité des branches professionnelles et des entreprises spécifiques.