Législatives 2024 : Économiste Décrit un Programme « Sans Souffle » et Trouve des Similarités Surprenantes


Sylvain Bersinger, économiste en chef du cabinet Asteres, offre son analyse des divers programmes économiques des grandes formations politiques sur franceinfo.

Les Économies Défiées: Une Analyse des Programmes Électoraux

Un Chef Économiste à la Loupe des Législatives

Sylvain Bersinger, directeur économique au cabinet Asteres, s’est attelé à une tâche complexe : analyser minutieusement les propositions économiques des différents partis en lice pour les prochaines législatives. Il a compilé ses conclusions dans une série de synthèses détaillées.

Un Scepticisme Justifié

Selon Bersinger, le léger scepticisme des créanciers de la France n’est pas infondé. Même si on ne parle pas d’une crise massive, on constate une certaine réticence des investisseurs envers les obligations d’État françaises, entraînant une hausse des taux. Cette situation est exacerbée par des programmes électoraux qui manquent de financement adéquat. Par conséquent, dans un environnement déjà marqué par une dette publique élevée et un déficit budgétaire significatif, ces réactions ne sont guère surprenantes.

Une Dette Publique Atteignant des Sommets

La dette publique française a franchi la barre des 3 000 milliards d’euros, un chiffre alarmant confirmé récemment. Dans ce contexte, l’exemple de Liz Truss au Royaume-Uni en 2022 est édifiant. En annonçant des réductions d’impôts massives sans les financer, elle avait semé la panique sur les marchés, provoquant une crise de confiance envers la livre sterling et les titres du trésor britannique. Cela avait conduit à son retrait prématuré. La situation actuelle en France présente des similitudes inquiétantes, avec des programmes en tête des sondages qui pourraient creuser de grands trous budgétaires.

Les Priorités Économiques au Cœur des Débats

Les élections à venir mettent l’accent sur des questions économiques cruciales telles que les retraites, le pouvoir d’achat, et les salaires. Cette focalisation s’explique en partie par le contexte inflationniste récent, le plus notable en quarante ans. Malgré une inflation annuelle ramenée à 2,1 %, les salaires ont augmenté avec retard, érodant le pouvoir d’achat des citoyens. Ainsi, il est logique que les préoccupations économiques dominent les programmes électoraux.

Points Communs et Divergences des Programmes

En examinant les programmes du Nouveau Front Populaire (NFP) et du Rassemblement National (RN), on observe à la fois des différences et des similitudes, notamment dans leur vision protectionniste de l’économie. Ces partis prônent une fermeture à la mondialisation, avec l’idée que protéger les emplois locaux paraphraserait le pouvoir d’achat, une notion que Bersinger qualifie d’absurde. Selon lui, « le but du commerce international, c’est avant tout d’importer et d’acheter ce que les autres font mieux et moins cher que soi-même. »

Blocages et Renégociations Commerciales

Le NFP propose un blocage des prix mais ne préconise pas une fermeture totale des échanges. Toutefois, la renégociation de nombreux accords commerciaux traduit une vision restrictive du commerce. Leur programme mise sur des dépenses publiques pour stimuler l’économie, notamment dans les services publics et les retraites. Des mesures coûteuses comme le retour de l’âge de la retraite à 60 ou 62 ans exigent un financement solide.

Une Relance Economique Contestée

Le concept central du NFP repose sur la relance de la consommation via des hausses de salaires, une approche que Bersinger critique vertement. Se référant à Paul Krugman, il évoque le « keynésianisme vulgaire », une application simpliste de la théorie de Keynes. Cette idée suggère de relancer l’économie par la demande lorsque celle-ci manque. Actuellement, Bersinger estime que la France souffre davantage de problèmes d’offre que de demande. « Keynes dit qu’il faut relancer l’économie par la demande ‘quand elle souffre d’un manque de demande’, ce qui à mon avis n’est pas le cas aujourd’hui », insiste-t-il.

Des Chiffres Optimistes mais Illusoires

Les recettes prévues par le NFP, notamment celles issues de nouvelles taxes sur les superprofits et les très riches, sont jugées surestimées par Bersinger. Il note que les hypothèses utilisées dans leur chiffrage sont trop optimistes. Même en acceptant leurs projections, on observe un déficit apparent. Avec une analyse plus objective, cela se traduirait par un trou budgétaire d’environ 50 milliards d’euros.

Un Programme Prudent mais Insuffisant

Pour Renaissance, le parti de la majorité présidentielle, le programme est notablement restreint, se limitant à une règle d’or « anti-hausses d’impôts ». Les mesures proposées restent modestes en termes de coût et ne suffisent pas à combler le déficit public, qui pourrait encore croître de 10 milliards d’euros. En somme, le programme manque de dynamisme et fait l’impasse sur des réformes ambitieuses.

Conclusion

En résumé, Sylvain Bersinger offre une critique nuancée mais sévère des propositions économiques actuelles. Entre programmes irréalistes et manque de vision, les défis économiques de la France nécessitent des solutions plus viables et audacieuses.